Mandalay – On the road to… « Mouais…dalay »

Mandalay… Un nom si mélodieux qui cache un physique assez ingrat. Mandalay n’est pas belle. Elle a du charme dirons-nous, pour être courtois. L’atmosphère générale est bruyante, Mandalay beugle dans un vocabulaire de charretier. Elle est vêtue de haillons, les scooters brassent la poussière et salissent son allure sans qu’elle y prête attention.

Mandalay se complet dans cette approximation car elle sait qu’elle cache de véritables perles sous certains de ses lambeaux de tissus. En soulevant un pan de sa jupe, Ava se révèle à nous, dans ses environs. Petit bijou rural, elle se parcourt en calèche et nous y découvrons ses trésors dont un monastère en teck, Bagaya, isolé dans une végétation dense, de rizières ou plantation de bananes.

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En soulevant un autre pan, elle nous invite à explorer Sagaing, cette colline verdoyante abritant de nombreux stupas blancs qui se détachent du décor.

Dans le sein même de Mandalay, des joyaux d’architecture se dispersent par ci par là, comme des ornements mal situés sur une robe du soir. Le célèbre pont en teck U Bein, long de 1,2 kilomètres, n’a pas la beauté ni l’éclat que mon imaginaire lui donnait mais son charme maladroit se combine parfaitement avec la ville en elle-même. Il est bancal, sinueux, les planches invitent régulièrement les passants à trébucher. Un astrologue lit votre avenir dans vos mains depuis l’un des petits abri du pont, un marchant de glaces attend ses clients depuis un autre abri.

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Une autre petite pépite est le monastère Shwenandaw, aussi en teck, et merveilleusement sculpté par des artisans quasi divins qui ont su animer la matière et lui permettre de traverser le temps et les moussons jusqu’à ce jour précis.

Enfin, la pagode Kuthodaw finit d’habiller Mandalay. 729 stèles de marbre blanc toute insérées dans autant de petits stupas, composent les pages du plus grand livre du monde, le canon bouddhique. Lieu aussi géométrique que surréaliste à découvrir pendant qu’un ouvrier repeint petit à petit chaque stupa d’un blanc éclatant… mais pour combien de temps…

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Cependant mon coup de cœur se situe à une heure de bateau au nord de Mandalay. Il y avait certains lieux dont les images m’avaient hypnotisée depuis Paris. Les sirènes de l’Irrawaddy continuaient leur chant durant la traversée pour Mingun. L’imposante pagode inachevée se dresse depuis le rivage lorsque la brume se dissipe. A son pied, je ressens la même émotion qu’à Bagan. Décomposée, inachevée, fissurée, me voilà qui m’identifie à cette bâtisse de brique qui dénote avec tout autre bâtiment du Pays.

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La pagode Myatheintan de Mingun continue de me fasciner, son architecture est atypique et symbolise le mont Meru, le centre de l’univers pour les bouddhistes. Sa mine blanche face aux rayons du soleil dégage une aura céleste. A son sommet, nous allumons notre encens et laissons dernière nous une offrande de fleurs.

Mandalay, sans doute as-tu mal vieillie, toi qui inspirais films et poèmes, toi qui as même été chantée par Sinatra. Ex ville royale, tu es tombée de ton piédestal en te foulant la cheville. Ta démarche reste ainsi maladroite mais dans tes rides tu gardes l’étincelle des vestiges de ton histoire.

Je souhaite ajouter un petit mot sur notre guide. Il s’est révélé avoir une histoire aussi complexe que la ville. Ancien professeur d’anglais, lui aussi est tombé de son piédestal et a été incarcéré pour activisme politique. Torturé (je vous passe les détails), transféré de prisons en prisons, il s’est néanmoins reconstruit, tout comme le palais royal de Mandalay, s’appuyant sur ses fondations et est devenu guide. Sa supposée future épouse travaille depuis 2 ans en Thaïlande, dans une usine (dit-il) et cela fait un an qu’ils n’ont pas été en contact. Difficile à comprendre. Il ne nourrit plus d’espoir quant à leur relation. Du fait de son passé de prisonnier, il pense qu’ils ne se marieront jamais d’ailleurs.

Sinatra lui, a eu 4 épouses.