Et de deux.

C’est curieux de penser que 2 semaines sont déjà passées et les 6 mois à venir me semblent déjà aussi fugitifs. J’essaie de profiter de ce que la ville a à offrir mais la météo du week-end a vraiment été inaccueillante… même totalement dégueulasse ! L’envie de rester sous la couette à regarder des films prédominait mais j’ai bravé le froid, la pluie, la grêle et même la neige en moins de 24h.

Tout commença par un cours de yoga à moitié en arabe, à moitié en anglais. Lorsque la professeur est arrivée, j’entendais ma mère me faire une remarque sur son gabarit. Car effectivement son physique est bien loin de celui des professeurs parisiennes, sveltes, élancées, aux muscles bien dessinés, du genre plutôt bedaine de humus et cuisses de kebab et ce n’était pas déplaisant du tout, me permettant presque  d’accepter mes maladresses de yogi en herbe plus facilement.

Comme le vendredi est le nouveau dimanche (autrement dit que beaucoup de lieux sont fermés), ma coloc m’a embarqué pour un brunch à la mode orientale, remplaçant la salade de tomates mozza par du haloumi, remplaçant le pain frais par des pitas généreuses, l’omelette par des œufs brouillés aux épices, le beurre et la confiture par du humus. Un délice. Le lieu avait tout d’un petit café montréalais, la clientèle très éclectique, une très belle surprise que je partagerai volontiers  avec mes visiteurs de passage prochainement.

La journée se poursuit dans l’improvisation : je me retrouve dans un magasin de viande de porc vendant les saucisses fines polonaises et du bacon à prix d’or. Je me retrouve dans un magasin de fromage alors que je n’en mange pas (même si le haloumi, ce n’est pas si mal) et trouve du stilton pour mon père. Les températures étaient nettement en baisse, j’ai dû partir à la quête de pulls en laine (notons que la veille de mon départ, et parce que la météo sur 2 semaines semblaient printanière, j’ai enlevé 4 pulls de ma valise). Les centres commerciaux sont la rencontre de l’Amérique du nord et de l’Europe,  d’ailleurs je remarque très rapidement que ce sont des lieux de sorties familiales dans laquelle les jordaniens (mais aussi les arabes du Golf identifiables par leur look) semblent déambuler pour des
journées entières. J’ai pu trouver 3 pulls. Je suis satisfaite.

Ce soir-là, une allemande de GIZ recevait chez elle collègues et amis de collègues. Mais ce qui a été le grand moment, mon grand moment, de la soirée, fut l’averse de neige. De la vraie neige, épaisse, compacte. Une belle surprise, encore une fois.

J’essaie d’ajouter un volet culturel à mes weekends et atterris au Jordan National Gallery of Fine Arts cette fois-ci. Là encore, une belle surprise, à 5 JOD. Le musée est plutôt petit mais expose des artistes de différents pays : Egypte, Soudan, Lybie, Syrie, Iran, Palestine, Jordanie… et possède un espace pour des expositions temporaires et l’actuelle présentait des photographies des paysages jordaniens. Le Wadi Rum de Lawrence d’Arabie, Aqaba, la mer morte, les réserves naturelles… La diversité des paysages a renforcé l’impatience des jours plus chauds et des virées en dehors d’Amman.

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Ainsi se clôt mon second week-end. J’entame les cours d’arabe cette semaine. Je poursuis mes chantiers RH pour l’ONG locale, je vais démarrer un nouveau chantier RH pour nos actions au camp de Zaatari et planifier un déplacement terrain, comme on dit, pour la deuxième moitié du mois. Le siège nous rend visite. C’est bientôt la chandeleur. Une envie folle de crêpes. Encore de nombreux lieux ammaniens à découvrir. Pas le temps de s’ennuyer.

Et surtout une chaleureuse pensée à mon papa qui se remet gentiment (je le souhaite) de son opération. Voilà l’une des affres de l’expatriation : ne pas être là. Heureusement, je le sais bien entouré.

Des airs d’ici et de là-bas

Le temps semble déjà passer un peu vite et d’un coup ralentir de façon sidérante. De nature plutôt pressée, je dois composer avec le rythme jordanien et les :”je t’envoie ça demain”. Cela me rappelle étrangement la Birmanie…

D’ailleurs des petits évènements ramènent à ma mémoire le quotidien de Yangon. En me promenant dans la rue, là-bas, je voyais souvent des aliments jetés à l’intention des chiens errants, le plus souvent des restant de riz. Ici, on jette les restes de pita pour les chats errants cette fois, sauf devant l’ambassade de France où on trouve des croissants et des pains au chocolat par terre : très chic !

A Yangon, les corbeaux étaient les maitres du ciel à l’aube et au crépuscule. Ici, les oiseaux chantent le matin et en journée en naviguant par bande dans l’azur.

A Yangon, il y avait de nombreux vendeurs de rue, ici nettement moins, mais il y a les camionnettes vendant des bonbonnes de gaz repérables de loin grâce à leur mélodie singulière, mélange de générique de fin de film et de musique d’ambiance issue du film The Shinning.

A Yangon, c’était les shan noodles à côté de la maison que je dévorais pour un oui ou pour un non, ici, mon choix s’est porté sur les falafel d’un bouiboui non loin de l’appartement. Je vais donc troquer ma bedaine de riz du passé par une bedaine de humus.

Marcher dans les deux villes est assez similaire: trottoirs aléatoires, densité du trafic routier, conduite anarchique… sauf que Yangon est une ville plutôt plate et qu’Amman, la ville des 7 collines, me fait grimper bien souvent 80 marches d’affilée sur mon trajet, parfois plusieurs fois de suite. Adieu donc la cellulite !

Faire ses courses me réservait souvent des surprises à Yangon : un paquet de macaroni au cheddar par-ci, des céréales américaines par-là, des baumes à lèvres introuvables en France… Amman me surprend de la même manière : du dentifrice Crest, des céréales (encore) en forme de petit beignet à la cannelle, une collection de mix à gâteaux betty crocker comme je n’avais jamais vue… et encore bien des choses à découvrir.

Par contre, contrairement à Yangon où la bière devait couter 1,5 euros, ici elle est plutôt a 8 euros. Certes, l’alcool est lourdement taxé mais quelque chose me fait penser que la qualité doit être un peu plus supérieure qu’en Asie…

La location d’appartement semble assez proche sur les 2 continents : loyers chers (à cause de nous, les expatriés), état de salubrité douteuse, paiement de minimum 6 mois à l’avance, propriétaires plus ou moins impliqués. Mais je prendrai le temps d’expliquer un peu plus en détail les logements a Amman.

A Yangon, lors des fêtes bouddhistes, on pouvait entendre depuis des hauts parleurs, les sermons et prières des moines, avec une voix grésillante et monocorde. Ici c’est l’appel de la prière qui résonne à heure fixe, plusieurs fois par jour, avec cette fois-ci une mélodie. D’ailleurs, après le Myanmar, pays aux milliers de pagodes, me voilà au pays des milles mosquées.

Au bureau, il y avait Thida qui me proposait du thé à mon arrivée. Ici c’est Ali qui met environ 8 minutes à faire mon thé (consistant en un sachet et de l’eau chaude) et qui ne me laisse pas le faire moi-même. Il n’arrête d’ailleurs pas de me dire “welcome” dès qu’il passe dans notre espace RH. Je crois qu’il ne connaît pas le sens du mot. Au départ je le remerciais. Au bout de la 10ème fois, je commence à ne plus réagir.

Dans la rue, on me sourit et me salue nettement moins qu’à Yangon. Ce n’est pas plus mal. Mais quelques femmes m’ont néanmoins saluée pour commenter mes cheveux “nice”, des femmes voilées. Amusant. Car sous leur voile, peut-être ont-elle aussi les cheveux bleus, ou roses… ou arc-en-ciel !

Mais à Amman, je peux monter sur mon toit, et profiter de la vue…

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Un peu de hauteur pour un premier week-end

J’entamais mon premier week-end un peu chafouine. Loin de ma routine de fin de semaine, je dois m’en créer une nouvelle et parfois ce n’est pas facile de se forcer. Je ne rentre pas déjeuner chez mes parents, je ne prévois pas de retrouver mon “cheum” après son badminton… Heureusement, le jeudi soir (car ici le weekend c’est vendredi / samedi), mes collègues me proposent de partager un verre. La bière soigne tous les maux, mais ne m’a pas permis pour autant de bien dormir. Première nuit chaotique, à la prochaine, je garde l’atarax à côté. Lors de mon premier week-end en Birmanie, j’avais visité le musée national comme une introduction à ma vie des prochains mois. Il faut en effet profiter de ces premiers weekend plutôt calmes pour faire le tour des attractions locales, s’approprier la ville, et aussi pour mieux accueillir les visiteurs des prochains mois.

J’essaie de me souvenir de mes premières impressions citadines de Yangon: avais-je autant l’impression que je ne maîtriserai jamais cette ville à mes débuts ? Que les promenades seraient insurmontables ? Ici j’ai l’avantage qu’il fait 20 degrés en moins et qu’il est plus agréable de déambuler au soleil, sans fondre sur place.

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Ma première excursion a donc eu lieu à la citadelle de Amman, perchée sur le plus haut sommet de la ville. Très rapidement, la vue panoramique me saisit. Il y a une certaine uniformité dans le paysage mais le site, en lui même, me séduit. Bon, je confesse avoir un faible pour les ruines, sans doute un héritage paternel. Donc, face à ce qu’il reste du temple de Hercule, je me rassure, je contemple, je voyage. Le site est assez étonnant car il a vu se succéder des âges différents : romains, byzantins et omeyyades. En effet, quelques pilliers font offices de ruines d’une église byzantine. Le seul bâtiment assez bien conservé est la salle d’audience du palais des omeyyades avec une coupole en bois (rajouté bien entendu). Je vois au loin l’odéon et le théâtre romain de la ville basse. Je vois un peu plus loin la mosquée du roi Abdallah. Je vois ce drapeau jordanien énorme voler dans le ciel (j’apprendra qu’il fait 30 / 60 mètres). En soit, la conservation du lieu est approximative mais les points de vue sur les différents quartiers de la ville me conquièrent. Il y a aussi un petit musée archéologique contenant objets, pierres sculptées, babioles. Peu après être sorti du musée, le chant de la prière s’élève des quatre coins de la ville. Ce moment était magique. Les échos donnaient l’impression d’une mélodie en canon, comme un souffle s’immisçant dans les lacets des ruelles jusqu’à s’élever à la citadelle. L’oxygène s’est mué en prière.

Après une promenade lente d’une heure, je décide de regagner mes pénates et entame un réel trek urbain. D’abord une sacré descente. Puis des marches. Beaucoup de marches. Près de 200 sur la totalité de mon trajet. Puis mon quartier. Je passe non loin de l’institut français. J’arrive au petit square à côté. Je passe la ligne d’arrivé. Je suis satisfaite et je ne me suis pas perdue !

Quelques personnes m’avaient dit qu’il était compliqué de marcher dans Amman. Ce n’est pas totalement faux. Mais selon moi, c’est aussi agréable que fatiguant. Ainsi, dans les méandres, on peut tomber sur des petits coins piétons résolument charmants. On accède à des vues de la ville originales. On apprécie différemment. Et puis je suis une marcheuse (encore un héritage paternel) mais je comprends aussi qu’on puisse être refroidi. Reste que je conseille quand même aux visiteurs de tenter le coup. Au pire, il y a toujours un taxi pour nous sauver des tendinites aux chevilles.

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La citadelle est une belle introduction et m’a permis de m’aérer l’esprit pour chasser un peu cette solitude des premiers temps. Un peu.

Nous verrons bien ce que me réserve la suite de ce premier week-end…